Chaque année des compétitions se produisent à travers le monde, pour les baristas, les torréfacteurs et aussi les producteurs. Cette année, c'est au Brésil que nous vous emmenons à la découverte des meilleurs cafés de ce pays. Et devinez quoi ? Le producteur avec qui Belco est partenaire a gagné la compétition sur les cafés natures ! Gabriela vous explique tout cela dans cet article.
Petite histoire de la Cup of Excellence
La Cup of Excellence est la première compétition internationale d’ampleur dans le monde des cafés de spécialité. C’est également l’une des plus prestigieuses, qui récompense les meilleurs cafés produits dans un pays (en fonction de la tasse). Créée en 1999 pour sa première édition, la fameuse compétition a parcouru un beau chemin durant ses 18 années d’existence et a changé le destin de nombreux producteurs ayant acquis le plus souvent une renommée internationale. La CoE a créé des mythes, a changé les mentalités et continue de rapprocher deux mondes pourtant physiquement si éloignés : le producteur de la ceinture équatoriale et les acheteurs européens, asiatiques ou américains.
Mais qu’apporte cette maturité à la CoE ?
Au cours de ces années, il a fallu évoluer avec un marché en constante mutation. Créé alors que la deuxième vague du café commençait à s’essouffler, le timing était parfait pour accompagner la naissance de la troisième vague et catalyser le mouvement. Pour sa 18
ème année, la CoE a bouclé la boucle comme pour clôturer sa jeunesse et montrer sa maturité. Car en effet, la toute première édition eu lieu au Brésil. Dans le passé,
deux compétitions étaient organisées : une compétition pour les cafés natures et une compétition séparée pour les café dits Pulped Natural. L’année dernière, l’organisation avait regroupé pour la première fois les deux compétitions en un seul événement. Les raisons pour le regroupement des deux compétitions en une sont nombreuses et dépassent les aspects pratiques et économiques. Certes, cela coûte moins cher d’organiser une seule compétition (temps, ressources, etc.)
mais si cela n’a pas pu se faire avant, c’est que les cafés natures ont été fortement sous-estimés par le passé. La fermentation était alors un vilain mot. Nous voulions des cafés propres et limpides. Aujourd’hui, le dégustateur est plus curieux et toujours à la recherche de nouveaux profils et de sensations fortes. Les cafés natures ont permis au monde du café de s’enrichir et de se rapprocher encore plus du monde du vin, par exemple où nous parlons de fermentation et nous abordons une palette d’arômes plus large. Durant cette édition d’ailleurs,
les cafés nature ont été mis à l’honneur avec des notes dépassant les 90 points. De plus, le grand vainqueur, le café « présidentiel » vient d’une ferme en biodynamie (Fazenda Camocim) qui remporte la 1
ère place avec un lot de nature. (
voir le classement) Le café nature est passionnant. Il suscite plus facilement la polémique car on le veut explosif, expressif et très fruité. Les palais se sont habitués aux fruits rouges et aux fruits exotiques. En fonction du degré de fermentation, le profil de la tasse suivra une échelle comme celle-ci :

Figure 1. Profil de tasse lié au degré de fermentation (présenté par le coordinateur CoE 2017 Brésil)
Le consensus autour des natures
Dans le cade de la Cup of excellence, nous cherchons quelque chose de très explosif sans rentrer dans le défaut, c’est-à-dire sans atteindre la case « acétique ». Le terme « funky », très à la mode, désigne un café qui n’est pas forcément limpide mais qui surprend par l’intensité de ses notes aromatiques. Il pique un peu, il étonne et laisse un goût fruité inoubliable à nos papilles. Si les torréfacteurs se sont bien appropriés ce nouveau terme, la limite semble parfois floue entre « absolument fabuleux » et « défectueux ». Car rentre alors en compte la perception individuelle et la culture de chaque dégustateur ce qui rend l’arbitrage un peu subjectif. « Funky » finit alors par regrouper le meilleur et le pire. A titre d’exemple, un dégustateur asiatique, bien plus habitué aux goûts fermentés, supportera plus facilement les notes fermentées d’un café et aura tendance à bien le noter, alors que les dégustateurs européens auront tendance à le classifier comme défectueux. Il existe bien heureusement un consensus général sur les meilleurs lots … et tant mieux !
Technologie et Terroir
Et au Brésil les producteurs ont bien compris qu’il fallait proposer des cafés de plus en plus surprenants. Connu pour son profil chocolaté avec une acidité douce, le café brésilien doit aujourd’hui relever le défis de surprendre et prouver au monde entier qu’il sait produire des cafés exceptionnels. Toujours à la pointe de la technologie agricole, les chercheurs et les producteurs ont commencé à explorer l’utilisation de levures diverses (levure de panification, de vinification….) dans le processus de fermentation du café, quel que soit le traitement choisi. Selon les premiers résultats expérimentaux, il serait possible d’augmenter la note d’un café de 3 ou 4 points grâce à l’ajout de levure. Les brésilien exposent fièrement le résultat de leurs recherches à un public partagé. Triche ou évolution d’une filière en construction ? Me vient en tête qu’en Afrique et en Ethiopie plus particulièrement, les producteurs n’ont pas recours aux mêmes moyens alors qu’on y trouve quelques-uns des meilleurs cafés au monde. Peut-être parce qu’ils ont accès à un mode de production plus proche de l’agriculture paysanne endémique du café, peut-être parce qu’ils ont des sols plus riches ce qui influence sans aucun doute le goût du fruit… D’autres pistes de réflexion plus simples existent. Et cette CoE le montre discrètement : un premier prix décerné à une ferme en biodynamie pourrait appuyer cette théorie. D’ailleurs, le nombre de prix décernés à des fermes en agriculture biologique a battu des records cette année. Les choses changent toujours et la CoE n’arrêtera jamais de nous surprendre.

Pedra Azul est une montagne de roche de granite située dans la région d'Espirito Santo
La présence d’autant de participants en agriculture biologique a été un premier choc car la Bio a souvent été considérée comme un
courant parallèle. Nous avons eu ensuite une inversion de tendance car l’Espirito Santo, historiquement producteur de cafés dits « Pulped Natural » (PN) a remporté la compétition avec un café nature. Le Minas Gerais, temple du café nature a remporté la seconde place avec un café PN. Le café brésilien se réinvente et nous sommes certains d’assister à une révolution des moeurs et des pratiques dans ce pays longtemps considéré comme une origine uniquement capable de produire du volume. L’État de L’Espirito Santo est bien là pour prouver le contraire et c’est symboliquement dans cet État, au pied d’une montagne majestueuse appelé Pedra Azul qu’a eu lieu cette 18
ème édition de la CoE. Pour l’histoire, l’Espirito Santo est le premier état producteur de Robusta. A cause de son microclimat froid et humide, les montagnes de l’Espirito Santo ont souvent été considérées comme les régions produisant les cafés les moins qualitatifs du pays. Ces montagnes sont néanmoins hautes (avec des points culminant à 1200/1500 m) et permettent aux producteurs capables de maîtriser les aléas de la météo de produire de vrais bijoux. Ils construisent aujourd’hui des serres avec température et humidité contrôlées pour y faire sécher le café.
Dans ces contrés capixabas*, la récolte est tardive. Elle a lieu d’octobre à décembre, ce qui exclut un très grand nombre de cafés de la CoE qui a lieu mi-octobre. Il faudra absolument, dans les éditions à venir revoir les dates de la compétition pour y inclure tous les cafés de cette magnifique région qui changeront sans doute encore une fois le visage de la compétition.
Gabriela avec d'autres juges lors du concours de la la Cup of Excellence 2017
Gabriela, pour l’équipe Belco
*Capixaba : qui fait référence à ce qui vient de la région de l’Espirito Santo