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Café11 March 2024

Je ne crois pas qu'il y ait de bonne ou de mauvaise torréfaction

Derrière cette réplique de film, un peu revisitée, on comprend que la torréfaction est une combinaison de choix propres à chaque torréfacteur ou torréfactrice. Et, c'est bien sûr en ce point que réside la beauté de ce métier artisanal complexe.

Construire sa propre vision de la torréfaction

Au croisement de l'art, de l'artisanat et de la science...

La torréfaction est au croisement entre l’art, l’artisanat et la science. Chacun ou chacune peut choisir le dosage de chaque partie pour construire sa patte, sa marque de fabrique. Le plus important est de pouvoir construire en conscience sa vision du café et de son atelier de torréfaction pour ses clients. Il est ainsi complexe, voire impossible, d’évaluer une torréfaction sans saisir le contexte global.

Ce contexte est la synthèse de toute la réflexion du torréfacteur, torréfactrice pour arriver au profil aromatique d’une tasse donnée, d’un café donné. Il est indispensable de pouvoir à la fois comprendre les intentions de cuisson, la cible visée et le café choisi.

Un métier de choix

Cet article a la volonté de mettre en avant la diversité qu’offre le métier de torréfacteur à travers l’ensemble de ses savoir-faire. Il serait réducteur de déclarer que le métier de torréfacteur se résume simplement à la cuisson du café.

Il débute avec le choix minutieux du café vert. Il fait appel aux connaissances de l’origine (typicité des terroirs, espèces, variétés botaniques, process), au travail d’analyse sensorielle (analyse organoleptique du café, projection de cuisson), aux problématiques du chef d’entreprise (stratégie, problématique de gamme, corrélation prix-cible) et à la vision personnelle (identité, valeurs, implication dans la filière). 

Connaître les variables

Ensuite la torréfaction se travaille comme une recette de cuisine avec plusieurs éléments à gérer afin de sublimer le café. La première étape étant de bien mettre à plat les variables qui impacteront la cuisson. Le principal élément est le café vert lui-même.

Il a sa propre « carte d’identité ». Bien comprendre le potentiel aromatique à travers le terroir, l’espèce, la variété botanique et le process (quoi de plus frustrant que de chercher des notes aromatiques qui n’existent tout simplement pas).

De façon complémentaire, la connaissance des données physiques (densité, taux d’humidité, crible) est indispensable à la mise en valeur du café lors de la cuisson. D’autres éléments sont impactants et demandent à être interrogés. 

... Pour mieux mettre en valeur le café

Selon la saison

Notre climat offre (encore) quatre saisons qui nous rappellent que le même café se cuira différemment en mars ou en juillet (le taux d’humidité de l’air ambiant a un impact significatif sur la cuisson). On peut aussi évoquer l’incidence du stockage, le design de la machine, le temps de préchauffe, le protocole de chauffe entre les différentes broches de torréfaction. Les variables directement liées à la cuisson du café doivent être connues, manipulées et expérimentées afin de pouvoir les exploiter avec confiance. Les principales sont la température de départ, la température de sortie, le temps total de la cuisson, la gestion de l’énergie, le temps de développement après le premier crack.

Selon l'évolution du grain vert

La torréfaction de café fournit facilement la possibilité de comprendre l’évolution du grain vert lors de la cuisson. Trois phases sont reconnaissables de façon visuelle, olfactive et sonore (on a de la chance, pensez à la torréfaction des fèves de cacao sans changement de couleur et sans crack). Le point jaune sera la manifestation visuelle et olfactive (douces nuances briochées ou céréalières) de la transition entre la phase de séchage (première phase) et la phase dite des réactions chimiques (les principales, réaction de Maillard et caramélisation).

Ensuite le grain se fera entendre au premier crack, sonnant la troisième phase : celle du développement et donc de la fin de la cuisson. La torréfaction reste un processus continu composé de trois phases interdépendantes. A chaque torréfacteur, torréfactrice d’approfondir la connaissance de ces phases pour mieux les exploiter et proposer la cuisson désirée.

En mesurant les données de la torréfaction

L’étape post-torréfaction commence par la mesure de données comme la perte de poids après cuisson, la colorimétrie ou le cupping contrôle qualité. Ces contrôles sont souvent délaissés ou négligés.

Par manque de temps, la réalité de la vie d’un atelier de torréfaction est de proposer du café et de le vendre (l’étape de mise en paquets est aussi indispensable qu’elle ne mobilise du temps), on gère les priorités. De temps en temps c’est aussi une étape qui peut être perçue comme moins importante ou trop contraignante ou encore réservée qu’à une catégorie de torréfacteurs-torréfactrices.

Quelles qu'en soient les raisons, la dégustation post-torréfaction doit être intégrée dans une routine d’un atelier de torréfaction. Des méthodes existent pour la rendre accessible et efficace (on peut en discuter quand vous voulez). Elle est nécessaire pour à la fois toujours mieux comprendre son café vert (vieillissement par exemple) et le profil aromatique recherché (affiner le profil au fil des torréfactions). Indispensable aussi pour s’approprier le café à travers sa cuisson et le transmettre lors de conseils aux clients. Primordial pour mieux comprendre le lien entre sa machine de torréfaction et l’impact en tasse. 

Le métier de torréfacteur est une discipline complexe où chaque étape est indispensable. Ces phases, du café vert à la vente, peuvent être comprises en 5 minutes, cependant pour les maitriser, il n’est pas certain qu’une vie suffise... Le métier n’est pas linéaire et chaque café, chaque cuisson peut être un prétexte à l’amélioration de ses savoir-faire.

L’expérience joue un rôle majeur mais elle n'est pas forcément égale au nombre d’heures passées devant la machine.

Tout en respectant son état d'esprit

Le plus important est sûrement l’état d’esprit, le questionnement, l’expérimentation (dans la mesure du possible économiquement), le partage avec ses pairs, la compréhension des clients et la dégustation (et encore la dégustation !). L’objectif est de savoir expliquer son propre cheminement du choix du café vert, du choix de la recette de cuisson spécifique, la validation du profil aromatique et le discours au client. Plus largement c’est aussi se positionner dans une dynamique d’amélioration continue qui amènera certes beaucoup de questions mais aussi des réponses qui feront toujours avancer.

Qu’est ce qui nous guide et nous anime en tant que torréfacteur, torréfactrice ? La réponse est aussi passionnante que personnelle. La communauté se retrouve quand même autour de points communs : la volonté de partager la diversité qu’offre la filière café, la volonté de transmettre ses valeurs et la volonté d’offrir une vision personnelle des cafés à travers sa torréfaction.

Et, pour finir, la dégustation qui reste notre seul langage commun entre producteurs, sourceurs, torréfacteurs et clients alors dégustons, communiquons, partageons.

Il n’y a donc pas de bonne ou de mauvaise torréfaction, mais une variété de messages qui ne cherchent qu’à mettre en valeur le métier de torréfacteur, torréfactrice et surtout mettre en valeur le café, les cafés.

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Rédaction: Denis

Responsable Ecole du Café, Q-Grader

Publié le 14/05/2025